mercredi 30 janvier 2013

DIDIER MANYACH


Retour en terre....

Teshigahara  La Femme des sables.


Apprendre à ne plus être qu’un étranger, sans retour possible. Jours et nuits sous un ciel vide.
Il y a opaque, les fissures littorales, des cris aigus, les sources et des phrases retrouvées. On fait semblant de faire du bruit avec sa bouche mais il n’y a que la mort.
... Tout recommence à zéro. Un grain de sable balayé dans le nombre infini. Chair d’ombelle soufflée de l’autre côté de la rive...


MIGRATION, PIRATERIE ET MERVEILLE DE GRÂCE
DIDIER MANYACH

mardi 29 janvier 2013

Cormac McCarthy Cercle 10


                                          Cercle 10


       Des eaux douces au sable des mers, la terre reste une "ILe" !



    Autrefois il y avait des truites de torrent dans les montagnes. On pouvait les voir immobiles dressées dans le courant couleur d’ambre où les bordures blanches de leurs nageoires ondulaient doucement au fil de l’eau. Elles avaient un parfum de mousse quand on les prenait dans la main. Lisses et musclées et élastiques. Sur leur dos il y avait des dessins en pointillé qui étaient des cartes du monde en son devenir. Des cartes et des labyrinthes. D’une chose qu’on ne pourrait pas refaire. Ni réparer. Dans les vals profonds qu’elles habitaient toutes les choses étaient plus anciennes que l’homme et leur murmure était de mystère.
(extrait1)



L'Eternité et un jour, d'Angelopoulos



   Il pensait qu'il pourrait encore y avoir des navires mortuaires quelque part au large, à la dérive avec leurs lambeaux de voiles qui pendaient comme des langues. Ou de la vie dans les profondeurs. De grandes pieuvres se mouvant sur le fond marin dans la froide obscurité. Faisant la navette comme des trains, leurs yeux de la taille de soucoupes. Et peut-être qu'au-delà des vagues en deuil il y avait un autre homme qui marchait avec un autre enfant sur les sables gris et morts. Peut-être endormis séparés d'eux par à peine une mer sur une autre plage parmi les cendres amères du monde ou peut-être debout dans leurs guenilles oubliés du même indifférent soleil. 
(Extrait 2)

LA Route de Cormac McCarthy

Supervielle


"L'enfant et la rivière", d'un poète l'autre !

Louisiana story,  de Robert J. Flaherty


De sa rive l'enfance
Nous regarde couler :
« Quelle est cette rivière
Où mes pieds sont mouillés,
Ces barques agrandies,
Ces reflets dévoilés,
Cette confusion
Où je me reconnais,
Quelle est cette façon
d'être et d'avoir été ? »
Et moi qui ne peux pas répondre
Je me fais songe pour passer aux pieds d'une ombre.

Jules Supervielle, L'enfant et la rivière

Gadenne,

Penser l'eau !!!  


Après la pluie, Kurosawa


 Il crut entendre dans le jardin comme de l'eau qui coulait. Cela semblait ruisseler du haut du ciel, en un mince filet rapide et bavard, et se répandre sur les jeunes feuilles, de branche en branche. Le bruit s'éloignait, se rapprochait, limpide, intarissable, secoué de légers soubressauts.
 Parfois, il s'interrompait net, puis reprenait, avec une sorte de familiarité, d'insolence, comme les choses qui ne sont pas faites pour s'arrêter... 

Paul Gadenne, L'Intellectuel dans le jardin.

Gadenne



Au-dessus des nuages, le Néant ?


Ami de l'eau ami du ciel ami des arbres
Le vent m'enferme en son ressentiment
Le pavé crie le passant me désarme
Le ciel me brûle et ne me répond pas

Bad Lieutenant de Ferrara
Paul Gadenne, La Petite ourse.

Georg Trakl


Les eaux nocturnes de l'enfance !


La Nuit du Chasseur de Laughton
Calme obscur de l'enfance

Sous des frênes verdoyants
Pâture la douceur d'un bleuâtre regard : repos d'or.
Le parfum des violettes ravit une âme obscure: épis qui
se balancent
Dans le soir, semence et ombre d'or de la mélancolie.
Le charpentier taille des poutres; dans la combe crépusculaire
Le moulin tourne; dans les feuilles du noisetier se galbe une bouche pourpre,
Virilité penchée rouge sur des eaux nocturnes.
Il est léger l'automne, l'esprit de la forêt; un nuage d'or
Suit le solitaire, l'ombre noire du descendant.
Déclin dans la chambre de pierre; sous de vieux cyprès
Les images nocturnes des larmes ont conflué en une source;
Œil d'or des origines, patience obscure de la fin.


Georg Trakl, Le chant de l'isolé 


dimanche 27 janvier 2013

Henri Bosco



L'éveil des eaux !


Quand j'ouvris les yeux l'aube se levait. D'abord je vis le ciel. Je ne vis que le ciel. Il était gris et mauve, et seul, sur un fil de nuage, très haut, un peu de rose apparaissait. Le vent 
tissait, plus haut encore, d'autres fils à travers un treillis léger de vapeurs; et, du côté de l'aube, une buée d'or pâle se levait lentement de la rivière. Un oiseau lança un appel, peut-être était-ce une bouscarle. Son cri hardi et coléreux éveilla le coassement discret d'une grenouille. Puis un vol de plumes mouillées froissa les touffes de roseaux et tout autour de notre barque le murmure confus des bêtes d'eau, encore invisibles, monta: tous les bruits, tous les soupirs, des mouvements furtifs, un clapotis, des gouttelettes, ce plongeon d'un rat effaré, là-bas cet oiseau vif qui s'éclabousse, le choc d'un éboulis, le glissement d'une sarcelle qui se faufile entre les joncs, un rauque appel, la rousserole, tout à coup, le sifflet du loriot, et déjà, sous un saule du rivage, le roucoulement de la tourterelle... J'écoutais. Par moments la brise de l'aube passait sur ce monde irréel, ces lieux uniquement sonores, et les plantes des eaux s'éveillant du silence, pliées par le souffle, bruissaient doucement. La barque ne remuait pas. Comme un flotteur de liège, elle paraissait si légère qu'à peine tenait-elle à l'eau... 



Stand by me de Rob Reiner

Henri Bosco, L'enfant et la rivière