lundi 4 février 2013

Lubicz-Milosz,


Le Miroir sans tain ou le possible retour...



Le vieux fusil de R Enrico
























J'ai senti mon cœur saisi
Par un son de clavecin
Sourd, jauni, quasi défunt,
Trouble comme le parfum
De pluie et de parchemin
Des in-folio latins
Et proche et pourtant éteint
Comme un moi-même indistinct
Au fond d'un miroir sans tain,
Étrange, secret tintouin
Intérieur et lointain,
Une de ces pauvres gammes
De bémols couverts, chagrins,
Qui réveillent dans les âmes
La sainte odeur des matins

De la claire adolescence
Et du profond des jardins
Et de l'eau dans le silence
Et du soleil sur le pain
Et du miel dans les faïences
Lourdes de mil huit cent vingt.
Et soudain, comme l'enfant
Ferme ses main étrangleuses
Sur le moineau grelottant
Trop tôt envolé du nid,
Oui, — qui le croirait ? — soudain
Comme quand j'avais vingt ans
(Enfant épris d'une enfant)


Lubicz-Milosz, La Gamme.(extrait)


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